Communiquer autour d'une décision de justice
Voilà un exercice qui est loin d'être anodin surtout en matière familiale. Lorsque des parents sont séparés et ne s'entendent pas, la décision prise par le juge aux affaires familiales pousse au dialogue. Paradoxe, car pour beaucoup de couples, cette décision est attendue pour marquer la fin de leur relation. Une façon de tourner la page.
Or, lorsqu'il y a des enfants, la décision du juge marque le début officiel d'une nouvelle étape : la nécessité d'être parents ensemble, selon les modalités fixées. Ce passage devant le juge donne, certes, un cadre et évite de négocier sur tout ce qui concerne les enfants. Seulement, ce que fixe la décision de justice n'est pas un programme détaillé qu'il suffit d'appliquer à la lettre. D'ailleurs, les juges aux affaires familiales s'y refusent et ne vont pas jusqu'à détailler l'horaire précis de l'alternance entre les parents, les conditions de passage des affaires, des papiers, qui emmène l'enfant chez le médecin etc... Certains juges l'affirment clairement : nous ne sommes pas là pour nous substituer à la capacité qu'ont les parents de s'organiser et de s'occuper au quotidien de leurs enfants.
La décision exécutoire signifie aux parents : à présent, vous avez le cadre, à vous de composer avec. Ce cadre sur le papier peut sembler satisfaisant ou pas. En tout cas, dans la pratique, vont apparaître les inévitables tensions de sa mise en oeuvre.
L'application de la décision de justice rend
le dialogue nécessaire dans la plupart des cas. Les enfants ne sont pas des objets et n'entrent pas aisément dans un cadre trop fixe ou appliqué de façon rigide. La réalité du quotidien est faite d'aléas, d'événements inattendus, de changements qui nécessitent bien sûr de s'adapter. Que fait-on si l'enfant a un anniversaire le samedi où l'autre parent doit venir le chercher ? Que décider si la fête de Noël du travail de l'un ou l'autre parent tombe la semaine de garde de l'autre ?...
L'absence de dialogue, la rigidité des positions, c'est de toute façon l'enfant qui en subit en premier les effets. Cela lui rappelle en permanence qu'il est une source de conflit entre ses parents. Il n'est pas rare que pour échapper à ce dilemme, l'enfant finisse par demander à ne plus aller chez l'un de ses parents.
Cependant, il est vrai que cette communication est difficile à mettre en place pour les parents. Pas simple de parler avec son ex sans charger ses messages de sous-entendus, de reproches, sans chercher d'une façon ou d'une autre à régler ses comptes et finalement à continuer la bataille. Pas simple de ne pas céder à la tentation de se précipiter au commissariat à la moindre entorse à la décision du juge, au point d'en faire une arme, alors que ce n'est pas sa raison d'être initiale.
Il peut donc être réaliste de prendre conscience qu'une décision de justice pour produire ses effets et aider parents et enfants dans la nouvelle situation implique la mise en place d'un dialogue suffisant et dénué d'un trop plein d'affect rendant impossible toute prise de décision sereine.